1. Sur les traces des moulins oubliés de la Beauce

À première vue, la Beauce ligérienne se déploie comme un vaste tapis doré sans relief ni surprise. Pourtant, elle fut jadis parsemée de dizaines de moulins à vent, témoins vivants d'une terre labourée à force d’ingéniosité et d’efforts. Aujourd’hui, ces moulins rythment encore, mais plus discrètement, le paysage.

  • Moulin de la Garenne à Villeneuve-sur-Conie : Parfaitement restauré, il illustre l’importance du blé en Beauce. Période idéale pour la balade : de mai à septembre, lors des démonstrations de mouture (réservation possible à l’Office de Tourisme).
  • Sentier des Moulins (Mer – Suèvres – Maves) : 7 km ponctués de panneaux pédagogiques sur l’évolution des énergies et le patrimoine hydraulique du Loir, un incontournable pour les amateurs de patrimoine industriel et de paysages bucoliques.

La disparition progressive des moulins au XXe siècle raconte une mutation agricole profonde, remplacée par de nouveaux outils et la mécanisation. On estime qu’il existait plus de 120 moulins fonctionnels autour de Mer au XIXe siècle (Patrimoine Moulins de France). Aujourd’hui, quatre d’entre eux sont encore visibles, dont deux restaurés.

2. Forêt de Marchenoir : immersion dans l’un des poumons verts de la Beauce

Souvent considérée comme un simple “poumon vert”, la forêt de Marchenoir est un symbole de résilience écologique et de ré-ensauvagement discret. Elle s’étend aujourd’hui sur plus de 3600 hectares de feuillus et de pinèdes gérées durablement (ONF).

  • Circuits balisés allant de 2 à 13 km, avec tables d’orientation et points panoramiques sur la Val de Loire.
  • Découverte d’arbres remarquables (chênes pluri-centenaires) et inventaire ornithologique (l’autour des palombes, espèce phare, y est recensé).

Focus : La Forêt de Marchenoir fut, au XVIIe siècle, le théâtre de la fondation de la célèbre abbaye cistercienne Notre-Dame de la Trappe, qui participa à l’essor du village situé à sa lisière.

3. Villages oubliés et hameaux fantômes : l’autre Beauce

Parcourir la campagne ligérienne, c’est croiser des villages où le temps semble s’être arrêté, parfois autour de ruines recouvertes de lierre ou d’églises désaffectées.

  1. Trinay : Ancien village médiéval à la frontière du Loiret, connu pour son ensemble de motte féodale et de maison troglodytique. Circuit de 4 km au cœur des vestiges dispersés.
  2. Hameau des Fossés à Chambon-la-Forêt : Un hameau aujourd’hui en partie déserté, qui fut au XIXe siècle l’un des centres d’élevage de la région.

Anecdote : La région comptait plus de 200 lieux-dits et hameaux au recensement de 1901, dont une trentaine se sont vidés pendant l’exode rural de l’après-guerre (INSEE).

4. Sur les chemins de Conie : rivières secrètes et zones humides

La Conie, rivière discrète et un peu oubliée, se faufile entre Beauce et Orléanais. Longue de 34 km, elle offre un terrain de balade inattendu, avec prairies inondables et zones de biodiversité sauvegardées.

  • Le sentier de la Conie à Conie-Molitard : circuit de 6 km le long d’une réserve naturelle remarquable pour l’avifaune (plus de 80 espèces observées selon la LPO).
  • Berges sauvages où l’on peut croiser la rare Rainette verte et écouter le chant du Loriot d’Europe, au printemps.

Le bassin de la Conie abritait jadis des “lavoirs à chevaux” dont il ne reste aujourd’hui que des traces, retrouvées sur les cartes IGN de 1905.

5. Le patrimoine méconnu des églises rurales

Loin de la Loire majestueuse et de ses châteaux célèbres, les petites églises disséminées dans la Beauce ligérienne abritent bien des trésors, parfois à peine mentionnés sur les guides.

  • Église de Binas : Surnommée la “chapelle des céréaliers”, elle recèle un surprenant décor peint du XIXe siècle représentant les travaux des champs. Elle est ouverte aux visiteurs lors des Journées du Patrimoine.
  • Église Saint-Jean-Baptiste de Suèvres : Mélange de styles Roman et Renaissance, elle conserve un retable en bois doré classé Monument Historique depuis 1986.

Cette singularité architecturale reflète autant la richesse agraire du territoire que la spiritualité populaire qui animait ses habitants. De récentes études de l’Université d’Orléans ont permis d’inventorier 127 églises rurales et chapelles isolées sur le périmètre "Beauce ligérienne" (Ministère de la Culture).

6. Balades naturalistes et plantes rares sur le plateau de Lorges

Entre Lorges et Maves, les landes et pelouses calcaires du plateau contrastent avec l’image monolithique de la Beauce “greniers à blé”. Ici, plus de 210 espèces de plantes recensées (Conservatoire d’Espaces Naturels Centre-Val de Loire), dont plusieurs protégées au niveau régional :

  • L’orchis grenouille, rare en Val de Loire.
  • Le trèfle scabre, réputé pour sa floraison précoce sur sols pauvres.
  • La buphtalme à feuilles de saule, plante indicatrice des milieux ouverts.

Des sorties botaniques sont régulièrement organisées au printemps par l’Association Nature Centre, avec prêt de jumelles et de loupes sur inscription préalable.

7. À vélo sur l’ancienne voie ferrée de Beauce

Les cicatrices du passé industriel ne sont jamais très loin. La ligne de “la petite Beauce” reliait Blois à Orléans via Mer, Beaugency et Patay, aujourd’hui déclassée depuis les années 1970. Ce tracé est devenu l’un des plus beaux itinéraires cyclables de la région, accessible aux familles et aux sportifs :

  • 28 km de piste aménagée au départ de Mer, jonchée d’anciens quais, haltes ferroviaires reconverties, et points de vue sur les cultures maraîchères.
  • Signalétique patrimoniale détaillant le rôle crucial du rail dans le développement agricole local (la coopérative de Mer envoyait, en 1948, plus de 600 tonnes de céréales par mois selon les archives SNCF).
  • Possibilité de louer des vélos (classiques ou électriques) à la Maison du Tourisme de Mer.

Le parcours croise plusieurs marchés de producteurs et des points de dégustation de bières locales, parfaits pour une pause gourmande.

Repères pratiques : bien préparer sa balade

  • Se documenter : Plusieurs offices de tourisme proposent des fiches circuits téléchargeables gratuitement (Tourisme Beauce Val de Loire).
  • Respecter la nature : Les pelouses sèches et les berges humides abritent une faune fragile, éviter de sortir des sentiers balisés. Les chiens doivent être tenus en laisse dans les zones naturelles classées.
  • Temps fort : En été, privilégier les départs matinaux pour observer plus facilement les animaux et profiter de la lumière sur les plaines. Prendre en compte l’absence d’ombre sur certains tronçons exposés à la chaleur.
  • Sur les traces des histoires : Les Journées Européennes du Patrimoine (mi-septembre) et Rendez-vous aux Jardins (juin) sont l’occasion d’accéder à des lieux habituellement fermés.

Pause inspirante : les carnets de découverte

Pour aller au-delà de ces itinéraires, pourquoi ne pas se fabriquer un carnet de route personnel ? Recueillir les anecdotes glanées en chemin, noter les variétés de fleurs ou d’oiseaux observées, collecter les recettes partagées par les habitants rencontrés. Chaque promenade livre ainsi une vision nouvelle de la Beauce ligérienne, début d’une exploration qui ne demande qu’à se poursuivre, au fil des saisons et des rencontres.

Que l’on soit promeneur du dimanche, passionné de patrimoine ou amoureux de nature, la Beauce Val de Loire, loin d’être monotone, révèle à qui sait regarder toute la richesse de son histoire et de ses paysages secrets.

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